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AILLEURS VU D'ICI (depuis Haïti)
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  • Un blog d'analyse de l'actualité en Haiti et à l'étranger - des sujets en rapport avec l'Afrique seront aussi abordés. Certains textes ayant rapport avec les littératures du monde seront aussi traités.
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5 août 2007

PAUVRETÉ ET GASPILLAGE

le_matin

 

 Savez-vous qu’il existe le « luxe » du pauvre ? On a vu en effet des pays en proie à la plus grande pauvreté se permettre le luxe de se lancer dans des projets onéreux aux seules fins de propagande. Nous pourrions gloser sur les mirifiques palais de Mobutu dans l’ancien Zaïre, la cathédrale d’Abidjan de Houphouët Boigny ou pourquoi pas le programme nucléaire Nord-Coréen. Les missiles nucléaires étant les « joujous préférés » du Président de la Corée du Nord. Vous pourriez me dire que tout ceci peut servir de monnaie de singe et que Kim Jong Il a acquis par la magie du nucléaire le pouvoir de convoquer les grands de ce monde à la table de négociation et de faire écouter la voix d’un petit Etat dans le concert des nations. Le mythe de David résistant à Goliath continue, je l’avoue d’être irrésistible.

 Mais il existe aussi d’autres formes de gaspillage de ressources que l’on peut rencontrer dans des sociétés comme Haïti : Par exemple, celui qui consiste à exclure une compétence sur la base de sa participation à un gouvernement passé. Vous suivez mon regard puisqu’il suit une actualité récente au parlement. Si l’on comprend et applaudit à la vigilance de nos députés quant à l’utilisation des deniers publics, on pourra être sensible à l’argumentaire de l’ancien ministre de la culture de concentrer les maigres ressources de notre budget sur Port-au-Prince et Jacmel qui sont, comme Rio et Bahia pour le Brésil, les deux vitrines de notre carnaval national. C’est un choix stratégique que l’on pourrait corriger l’année prochaine au nom d’une certaine équité mais n’est ce pas « socialiser la misère » que de faire du saupoudrage avec un si pauvre budget. C’est donc un «  luxe » que le Ministre ne pouvait pas se permettre. Retrouver un ancien haut cadre dans le cabinet d’un nouveau ministre ne nous apparaît pas comme du népotisme, au contraire comme le commencement de nouvelles pratiques de coexistence dans un pays ou l’on ne parle que par étiquette : macoute, lavalas, de facto qui sont autant d’opportunités d’exclusion.

 

Pour revenir à cette tendance au « nettoyage idéologique », nous avons perdu sous le régime des Duvalier nos meilleurs enseignants qui sont partis pour le Québec et pour l’Afrique former des élites de qualité. Cette érosion du savoir a abouti à la catastrophe que l’on sait. Un pays pauvre comme le nôtre se permettait donc une fois de plus le « luxe » d’exporter des cerveaux. Et en 1986, il y eu aussi exode, les facultés et écoles supérieures perdirent de grands professeurs « déchouqués » parce que le gouvernement déchu les aurait nommés à leur poste.

En 1991, pour ne pas changer, la même sarabande  s’est poursuivie des suites du coup d’état. Aujourd’hui encore le spectre d’un déchouquage plus élégant, car habillé du manteau constitutionnel, est venu hanter l’auguste hémicycle de la cité de l’exposition.

Il ne s’agit pas ici, faut-il le rappeler, de s’en prendre à une prérogative constitutionnelle, dont dispose notre parlement mais de s’inquiéter de l’atmosphère triomphaliste de certaines séances d’interpellation qui dans leur tohu-bohu s’apparentent à des « danses de scalp ».

 
Un chanteur anarchiste disait qu’il ne faut pas laisser « les intellectuels joués avec des allumettes », allusion au pouvoir subversif de la pensée qui plus d’une fois dans l’Histoire « a mis le feu au poudre ».Nous dirons aussi à nos députés d’user avec modération et gravité de cette « artillerie constitutionnelle » qu’un peuple encore émeutier en l’an de grâce 1987 mis à leur disposition pour faire tomber un régime politique trentenaire.

 
Mais l’exécutif a aussi un rôle déterminant à jouer en ne donnant pas l’impression de traiter par-dessus la jambe certaines demandes de parlementaires anxieux de travailler à quelques mois d’un nouvel échéancier électoral. Si certains de nos députés sont jeunes et inexpérimentés, il faut tout de même les prendre au sérieux car ils sont armés…constitutionnellement pour changer de «  gouvernements comme on change de chemises » mais voila que reviennent les démons du passé que nous ne pouvons pas nous permettre le « luxe » de reproduire.

 Un autre luxe qu’on se permet souvent dans notre pays c’est celui des réformes inachevées, des études à jamais recommencées, des campagnes d’alphabétisation dont on pourrait célébrer les «  noces d’or » tant que cela dure. Il est temps de nous mettre à la culture des résultats et mettre fin à ces « luxes » de pauvres qui rendent plus pauvres.

 

Roody Edme

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