« El cambio va ? »
Beaucoup ont vu , sur CNN, le geste du président vénézuélien Hugo Chavez remettant au président des États-Unis, Barak Obama, en cadeau, le livre culte d’Eduardo Galiano : « Les veines ouvertes de l’Amérique latine ». Cet échange de bons procédés où l’on a vu un Obama souriant remercier Hugo Chavez, bien que relevant de la diplomatie spectacle, nous change de ces sommets houleux où des hommes d’État se chamaillent comme des enfants sur la cour de récréation.
L’effet Obama a
pris aussi en Amérique latine et le sommet, bien que dominé par la
controverse cubaine, a tout de même été assez détendu et augure d’une
ère nouvelle dans les relations entre les pays du cône Sud et leur
puissant voisin. Il faut certes plus que le charme et la séduction du
nouveau président des États-Unis pour effacer de longues années de
contentieux entre son pays et une région marquée par des relations
interventionnistes et une tradition de résistance et de méfiance. La
question de l’embargo contre Cuba qui remonte au début des années 60
est douloureusement perçue comme l’application inique de la loi du plus
fort.
Et cette question qui fâche s’est invitée au débat. Au
cours du sommet, les principaux acteurs ont un peu joué au chat et à la
souris pour ne pas la laisser complètement pourrir l’atmosphère d’une
rencontre où se disputaient attirance et méfiance des uns pour les
autres.
Le nouveau président américain avait pris la décision
de montrer des signes d’ouverture en autorisant le transfert d’argent
de la diaspora cubaine vers l’alma mater, une manière de desserrer
l’étau sans pour autant toucher à l’embargo, devenu depuis tant
d’années un « dogme idéologique ». Mais ce qui a changé, c’est
l’humilité du chef d’État le plus puissant du monde qui affirme que son
pays a pris une autre orientation. Toute chose qui n’est pas pour
plaire aux secteurs conservateurs qui ne veulent pas voir sortir, du
haut de forme de l’oncle Sam, un oiseau de proie transformé en colombe.
Toujours
est-il que, malgré tout, beaucoup d’Américains sont convaincus que
l’embargo est largement passé à côté de ses objectifs et que ce «
cordon sanitaire » étouffe tout un peuple et empêche tout appel d’air
dans des relations nouvelles entre le Nord et le Sud du continent.
La
nouvelle administration ne veut plus apparemment traiter par-dessus la
jambe les cendrillons de la région. Lorsque le président Obama déclare
qu’il n’y aura plus de partenaires « juniors » des États-Unis, mais que
désormais l’hyper puissance américaine sera audible dans toute la
région, cela semble être suivi d’effet avec la visite récente de la
secrétaire d’État Hillary Clinton venu s’enquérir du point de vue de
Port-au-Prince et de Santo-Domingo, avant le sommet du week-end dernier.
Reste
à savoir si le nouveau président des États-Unis pourra résister au
champ des sirènes de certains républicains qui commencent à donner de
la voix et à comparer vicieusement la politique étrangère d’Obama à
celle de Carter, en même temps qu’ils s’échinent sur le terrain de
l’économie à faire de la récession Bush une dépression Obama.
À
savoir aussi si certains, en Amérique latine, peuvent exister sans le
vieil ennemi yankee comme de ces drogues dont on s’accoutume.
Roody Edmé