PENSER NOTRE DÉMOCRATIE!
La
démocratie représentative connait en Occident une crise de définition.
Il existe en effet, un hiatus entre les mandataires et leurs mandants,
une fois les élections terminées. En France, ces jours-ci, on se plaint
que la campagne présidentielle s’englue dans des considérations se
trouvant à des distances cosmiques des préoccupations citoyennes.
D’où
une augmentation sensible de la défiance vis-à-vis de la classe
politique qui, pour se démarquer des sentiers battus est obligée de
faire campagne sur le thème de la rupture. Une sorte d’appel d’air
frais, destiné à renouveler l’intérêt du citoyen pour les affaires
publiques.
Notre
pays voit déjà ces nouvelles institutions fragilisées par ces «
pathologies » de la démocratie que sont la crise de la
représentativité, l’insoutenable distance entre « ceux qui représentent
et ceux qui sont représentés ». S’il est vrai qu’un Politique ne doit
nullement se soumettre comme une girouette au vent de l’opinion,
l’excès d’orgueil qui consiste à persister dans une voie sans issue,
sur une ligne de crête conduisant droit au précipice est on ne peut
plus suicidaire.
Dans
la logique certes, de la caravane parlementaire organisée il y a peu,
sensée recueillir les doléances citoyennes sur des questions sensibles
; encore faut-il que la caravane ne fasse son chemin, indifférente aux
« aboiements de la meute » .
Pourtant,
il y a quelque vingt ans, des intellectuels animant une émission de
radio s’interrogeaient déjà : « Haïti, quelle démocratie ? »
Depuis,
leurs voix se sont tues, perdues dans une incroyable solitude. C’est
vrai qu’à l’époque, il ne faisait pas bon d’être trop intellectuel. La
« lumpénisation de la crise » et l’éclatement du réel laissaient peu de
place à la réflexion sur comment penser notre démocratie. Il fallait
répétait-on, laisser les « jeunes
révolutionnaires » jeter sur le béton leur « gourme politique ». Cela
aboutit à une succession d’accouchements au forceps, ou autre «
opération-césarienne » d’une démocratie "mort-née". En ce temps-la, le
jeune leadership démocratique, surpris par le départ de Jean Claude
Duvalier, comme un enfant comblé de cadeaux à la nuit de Noël, ignorait
que des « Machiavel s’étaient convertis à la démocratie » et
attendaient le bon moment, comme cela s’est toujours passé à chacune de
nos agapes libératrices pour tout récupérer.
Aujourd’hui,
la crise institutionnelle dans ses différentes manifestations nous
rappelle que l’Etat de droit ne saurait se contenter d’élections plus ou moins réussies. Il réclame un supplément d’âme et surtout la maîtrise de la "peste" émotionnelle .
Surtout,
gravité, retenue de la part de nos Politiques qui se laissent trop
souvent séduits par les charmes sulfureux de la démocratie d’opinion.
Chacun veut être dans le hit parade politique de la semaine et, comme
dans un pays d’impunité, les scandales sont sans conséquences ; c’est
le cas de dire que tout ce qui ne tue pas en politique, engraisse.
Au
grand dam d’une opinion publique en plein désarroi et qui se demande si
ceux qu’ils ont placés aux commandes ont toutes leurs têtes !
Roody Edme